La prévision des passages de Mercure et de Vénus devant le Soleil nécessite une bonne connaissance des mouvements orbitaux des planètes intérieures. Elle fut possible à partir du début du XVIIème siècle grâce aux travaux de Johannes Kepler (1571-1630) et à la publication en 1627 des Tables Rudolphines nommées ainsi par Kepler en hommage à son ancien protecteur, l'empereur d'Allemagne Rodolphe II de Habsbourg (1552-1612). Kepler prédit le passage de Mercure du 7 novembre 1631 et le passage de Vénus du 7 décembre 1631 qu'il ne put observer. Il trouva également une période approximative de récurrence de 120 ans pour l'observation des passages de Vénus. Le passage de Mercure du 7 novembre 1631 fut observé à Paris par l'astronome Pierre Gassendi (1592-1655) "Le rusé Mercure voulait passer sans être aperçu, il était entré plustôt qu'on ne s'y attendait, mais il n'a pu s'échapper sans être découvert, je l'ai trouvé et je l'ai vu; ce qui n'était arrivé à personne avant moi, le 7 novembre 1631, le matin". Ce passage fut également observé par trois autres personnes Remus Quietanus à Rouffach (Haut-Rhin), le père Cysatus à Innsbrusck (Tyrol) et un jésuite anonyme à Ingolstadt (Bavière). Le passage de Vénus ne fut pas observé car suite aux imprécisions des tables Rudolphines, le passage devait se produire en Europe dans la nuit du 6 au 7 décembre 1631, en réalité la fin du passage fut visible depuis l'Europe centrale.
Le pasteur anglais Jeremiah Horrocks (1619-1641) prédit le passage suivant de Vénus pour le dimanche 4 décembre 1639 à 3 heures de l'après-midi (24 novembre 1639 du calendrier julien); prédiction en contradiction avec la période de 120 ans trouvée par Kepler. Il observa ce passage depuis son village de Hoole (près de Preston) en projetant l'image du Soleil sur un papier gradué et réalisa ainsi la première mesure d'un passage de Vénus devant le Soleil. En réalité, il ne put observer le début du phénomène, ayant interrompu son observation pour vaquer à ses obligations religieuses. À l'aide de cette observation, Horrocks calcula la position du nœud de l'orbite de Vénus, il estima que le diamètre apparent de Vénus ne devait pas être supérieur à la minute d'arc et que la valeur de la parallaxe solaire ne devait excéder 14", ce qui correspond à une distance Soleil-Terre d'environ 14700 rayons terrestres (soit environ 94 millions de kilomètres). Son Venus in sole visa, dans lequel il décrit son observation sera publié par J. Hevelius en 1662. D'autres parties de son travail sur Vénus seront éditées par John Wallis en 1672. Ce passage fut également observé par William Crabtree (1610 - 1644) à Manchester. William Crabtree était un ami de Horrocks, qui stupéfait par l'observation ne fit aucune mesure.
La dernière loi de Kepler permet de connaître la taille du système solaire à un facteur d'échelle près. La connaissance d'une seule distance entre planètes ou entre une planète et le Soleil suffit pour calculer toutes les autres. La parallaxe solaire est l'angle sous lequel on voit le rayon de la Terre depuis le Soleil, la connaissance de la parallaxe est donc équivalente à la connaissance de la distance Terre-Soleil. Les mesures et calculs effectués depuis l'Antiquité sous-estimaient grandement la valeur réelle de cette distance. Le tableau suivant donne les différentes valeurs connues :
Auteurs | Valeur de la distance Terre-Soleil | Valeur de la parallaxe | Distance Terre-Soleil correspondante en km |
---|---|---|---|
Anaximandre | ~54 rayons terrestres | ~1,06° | ~344 000 |
Eudoxe | 9 fois la distance Terre-Lune | - | ~3 450 000 |
Aristarque de Samos | 18 à 20 fois la distance Terre-Lune soit environ 360 rayons terrestre |
~9,5' | ~7 300 000 |
Hipparque | 2490 rayons terrestres | ~1,4' | ~15 860 000 |
Posidonius | 13090 rayons terrestres | ~15,8" | ~83 380 000 |
Ptolémée | 1210 rayons terrestres | ~2,8' | ~7 708 000 |
Copernic | 1500 rayons terrestres | ~2,4' | ~9 555 000 |
Kepler | - | inférieure à 1' | <21 790 000 |
J. D. Cassini | - | 9.5" | 137 600 000 |
Flamsteed | - | 10" | 130 715 000 |
Picard | - | 20" | 65 357 000 |
Les trois dernières valeurs ont été calculées à l'aide des mesures de la parallaxe de Mars lors de son opposition de septembre 1672.
En 1677, sur l'île de Sainte-Hélène, Edmond Halley (1656-1742) observa le passage de Mercure qui eut lieu le 7 novembre. Il imagine alors une méthode pour déterminer la parallaxe solaire, donc la distance Soleil-Terre. Il exclut les passages de Mercure, car la parallaxe de Mercure est plus faible et ses passages sont plus difficiles à observer. Sa méthode est fondée sur la comparaison des temps de passages de Vénus mesurés depuis plusieurs lieux situés à des latitudes différentes. La différence des temps de passages observés donne accès à la parallaxe de Vénus, puis à la parallaxe du Soleil. Les passages suivants de Vénus devant se produire en 1761 et 1769, Halley laissa à ses successeurs le soin de réaliser les observations et d'appliquer sa méthode. Ses prédictions et recommandations furent publiées dans les Philosophical transactions of the Royal Society en 1691, 1694 et 1716 (voyez ici la traduction du texte de 1716 en français). La méthode de Halley consistait à mesurer le temps écoulé entre le premier et le dernier contact intérieur de l'astre avec le disque solaire en au moins deux lieux ayant le plus grand écart possible en latitude. Pour cela, on devait se rendre sur les lieux d'observations souvent très éloignés et l'on devait effectuer en ces lieux des observations préliminaires de manière à déterminer avec précision leurs coordonnées géographiques, la latitude pour en déduire la parallaxe de la planète et la longitude de manière à synchroniser les observations. Par cette méthode, Halley espérait déterminer la parallaxe solaire à 1/500 près si l'observation des contacts était faite à deux secondes de temps près. L'astronome français Joseph-Nicolas Delisle (1688-1768) proposa, dès 1722, une autre méthode portant sur l'observation d'une phase unique du passage (premier ou dernier contact intérieur), cette méthode permettait d'augmenter la liste des lieux d'observations possibles en y ajoutant tous les lieux où une seule phase est observable. Mais elle demandait une très bonne connaissance des longitudes des lieux d'observations, chose difficile à obtenir en ce milieu du XVIIIe siècle.