Pendant des siècles, les couches denses de nuages qui enveloppent Vénus
ont constitué un obstacle majeur à l'exploration de sa surface.
Les premières cartes ont été dessinées grâce
aux observations des télescopes depuis le sol; elles ne mettaient en
évidence que de vagues structures. Une des toutes premières cartes
a été réalisée en 1645 par l'astronome amateur F.
Fonatana. Il pensait qu'il avait découvert des océans et des continents,
ce qui était en fait une illusion d'optique.
En 1667, G. D. Cassini observe Vénus depuis Bologne et remarque nombre de nébulosités brillantes. D'après l'analyse de plusieurs séries d'observations, il estime la période de rotation de Vénus à 23h 21 minutes. Plus tard, à Paris, il est incapable de confirmer ce résultat. Son fils J. J. Cassini n'aura pas plus de succès dans cette entreprise. Plusieurs années plus tard, un astronome nommé Francesco Bianchini pense qu'il a découvert des continents et des océans; il dessine des cartes de ce qu'il croit voir. Toutes ces observations sont attribuées à des illusions d'optique, ce qui était courant à cette époque.
Les observateurs de planètes les plus connus au XVIIIème siècle étaient Herschel et Schröter. Alors qu'il était jeune homme, William Herschel quitta sa ville natale (Hanovre) pour l'Angleterre où il a construit les meilleurs télescopes de son temps et découvert la planète Uranus. Johann Hieronymus Schröter était un astronome amateur; il a construit un observatoire à Lilienthal près de Brême. Il remarqua des tâches sombres cotonneuses sur le disque brillant de Vénus et en déduisit qu'il avait découvert de hautes chaînes de montagnes. Herschel n'était pas d'accord avec les observations des montagnes vénusiennes de Schröter, mais il remarqua également des structures sombres. Les deux observateurs conclurent que la surface visible était en fait constituée d'une enveloppe de nuages.
En 1897, Percival Lowell était convaincu d'avoir découvert de
nouvelles structures sur Mars et Vénus. Il produisit ses propres cartes
de Vénus et rejeta l'hypothèse d'une atmosphère opaque.
Quand la photographie fit son apparition, l'astronomie connut un grand nombre
de découvertes. Les scientifiques avaient beaucoup d'espoir de résoudre
le mystère de l'atmosphère nuageuse de Vénus. Mais cet
espoir ne se concrétisa pas et la photographie ne fut pas d'un grand
secours. Les premières images de bonne qualité furent obtenues
par F. E. Ross en 1923 à l'observatoire du Mont Wilson. De mystérieuses
structures apparaissaient dans l'ultraviolet et furent interprétées
comme les formes de nuages.
Des images de meilleure qualité ont été produites dans
les années 1950 par G. P. Kuiper (à l'observatoire McDonald au
Texas), N. A. Kozyrev (en Union Soviétique) et par R. S. Richardson (au
Mont Wilson). Les photographies de Kuiper et Richardson montraient de vagues
structures filamenteuses. Les astronomes français Boyer et Guérin
ont observé des structures en forme de "y" et ont calculé
une période de rotation rétrograde de quatre jours, ce qui fut
confirmé plus tard pour les nuages de haute altitude.
.
Le lancement de Spoutnik 1 en octobre 1957 ne marqua pas seulement le début de l'ère spatiale : il provoqua une véritable révolution dans la recherche sur les planètes. Les missions en direction de Mars et Vénus ont été développées dans un contexte de course à la conquête de la Lune. En 1962, l'Union Soviétique et les Etats-Unis voulaient montrer au public leurs compétences en matière de conquête spatiale. Vénus constituait une cible parfaite et fascinante. Le 12 février 1962, les ingénieurs de l'aérospatiale soviétique lancèrent le premier module spatial en direction de la planète sur de la Terre. Il y avait à bord de Venera 1 un magnétomètre pour la détection d'un éventuel champ magnétique dans l'environnement de la planète et des capteurs pour détecter des particules ionisées dans les couches supérieures de son atmosphère. Malheureusement, cette première mission spatiale ne remporta pas le succès escompté. Les communications avec la station au sol tombèrent en panne à huit millions de kilomètres de la Terre sans possibilité de réparation : le devenir de cette première sonde est totalement inconnu.
Les techniciens de l'aérospatiale américaine ont eu l'occasion
d'entrer dans l'histoire le 22 juillet 1962 avec le lancement de la première
mission réussie vers Vénus. A bord de Mariner 1 se trouvent des
instruments initialement développés pour le programme " Ranger
Moon ". Malheureusement, le lanceur Atlas Agena dévia de sa trajectoire
et dût être détruit par radio-commande cinq minutes après
le lancement. Cependant, les Américains avaient construit un modèle
de rechange identique au premier, Mariner 2, qui fut lancé 36 jours plus
tard pour un voyage vers Vénus. La sonde survola Vénus le 14 décembre
1962 à une distance d'environ 35000 kilomètres de sa surface,
ce qui fit de Mariner 2 la première mission spatiale réussie.
Aucune trace d'une ceinture de radiations ou de champ magnétique important
n'a été détectée. Durant le survol, deux radiomètres
équipés de capteurs sensibles à la chaleur ont scanné
le disque de Vénus : il apparaît que la surface est plutôt
sèche et brûlante, à environ 425°C sur l'ensemble de
la planète.
Deux autres sondes Mariner ont été envoyées pour survoler
Vénus : Mariner 5 en 1967 et Mariner 10 en 1973. Mariner 5 a fourni des
données atmosphériques supplémentaires, notamment sur la
super-réfractivité de l'atmosphère, tandis que Mariner
10 a ramené les premières images de Vénus. Le spectre
de la planète dans tout le domaine ultraviolet a été enregistré
trois heures avant le point de distance minimale entre la sonde et la planète
et jusqu'à huit jours après, afin d'avoir un film des flux et
turbulences présents dans la haute atmosphère de Vénus.
Image prise par Mariner 10, montrant les nuages tournoyants de
Vénus.
La planète paraît bleue au lieu de jaunâtre en raison des filtres utilisés lors de la prise de vue. (crédits : NASA)
Le vol de Mariner 5 fut accompagné par la sonde soviétique Venera 4, lancée seulement deux jours avant. Depuis le lancement de la sonde Venera 1 en 1961, les soviétiques ont mis à profit chaque fenêtre de lancement vers Vénus pour envoyer leurs sondes : trois en 1962, deux en 1963/64, et de nouveau trois en 1965. Deux des sondes lancées en 1965, Venera 2 et 3 (prévues respectivement pour un survol TV et une pénétration dans l'atmosphère) devinrent silencieuses juste avant la rencontre avec Vénus. Venera 4, le seul lancement réussi des deux tentatives de 1967, fut directement envoyé à Vénus. A une distance de 45 000km de la planète, la sonde lâcha une capsule sphérique d'un mètre de diamètre qui survécut à son entrée dans l'atmosphère (effectuée avec une décélération allant jusqu'à 300 fois g). Un parachute permit ensuite une lente descente dans l'atmosphère qui dura 94 minutes. Le module ne survécut pas à son arrivée à la surface de la planète, où règne une température capable de fondre du plomb et une pression 90 fois plus forte que sur Terre.
D'autres missions soviétiques de pénétration dans l'atmosphère
furent conduites. Venera 5 et 6, lancées dans la fenêtre de 1969,
étaient équipées de parachutes plus petits afin de permettre
une descente plus rapide dans l'atmosphère, avant destruction par la
chaleur. Malheureusement, ils ne survécurent pas longtemps à la
surface, étant très probablement endommagés également
par la forte pression atmosphérique. En 1970, Venera 7 survécut
un court moment à la surface et transmit des données, rapportant
ainsi une pression de 90 atmosphères et une température de 475°C.
Venera 8 avait pour mission l'étude du côté jour de Vénus
et reporta 50 minutes de données après l'atterrissage. Il survécut
à des températures de plus de 10 000°C à son entrée
dans l'atmosphère de Vénus.
L'Union Soviétique continua son exploration de Vénus en 1975 avec
deux sondes plus lourdes Venera 9 et 10. Chaque sonde comportait un orbiteur
et un atterrisseur. Deux jours avant la rencontre avec la planète, chaque
sonde lâcha son atterrisseur, lui permettant ainsi d'entrer avec un grand
angle d'incidence dans l'atmosphère de Vénus. Les sites d'atterrissage
des deux missions étaient séparés d'une distance de 2000
kilomètres. La capsule d'atterrissage de Venera 9 a été
construite de façon à résister aux pressions extrêmes
de l'atmosphère et à des températures allant jusqu'à
2000°C ; elle ne survécut pourtant que 65 minutes après l'atterrissage.
Cette capsule envoya les premières images de la surface de Vénus,
qui étaient claires en dépit des nuages denses permanents; il
n'y eut pas besoin d'y ajouter de la lumière artificielle. Les rochers
comportaient une ombre portée. La mission Venera 10 fut également
une réussite pour le retour d'images de la surface de Vénus.
Chaque panorama montre un paysage aussi lumineux qu'un jour nuageux sur Terre, avec des structures clairement visibles jusqu'à des distances de 100 mètres. Les sites d'atterrissage ressemblent à des déserts de pierre, sans sable ni poussière, recouverts de rochers dont la taille peut atteindre jusqu'à 10 mètres.
Venera 11 et 12, qui furent lancées vers Vénus en 1978, étaient essentiellement des répétitions des missions précédentes. Elle renvoyèrent beaucoup de données, mais pas de photos. Elles découvrirent des tempêtes avec éclairs (Venera 11 comptabilisa une moyenne d'environ 25 coups de foudre par seconde, et Venera 12 un total de presque 1000 coups), de l'activité volcanique, et que seulement une petite fraction de la lumière atteignait la surface de la planète à travers les nuages.
1978 a été l'année d'une véritable invasion de
Vénus : les deux missions russes Veneras étaient accompagnées
de deux sondes américaines, dont l'une a largué quatre différents
atterrisseurs afin de collecter des données sur l'atmosphère de
Vénus. Pioneer-Venus 1 - lancée le 20 Mai 1978 - arriva la première.
Elle se mit en orbite autour de la planète pendant 24h afin de réaliser
une étude détaillée de l'environnement proche de Vénus,
et de sonder la surface cachée par les nuages avec un système
radar pesant près de 11kg.
Le vaisseau Pioneer-Venus 2 suivit son prédécesseur le 8 Août,
larguant quatre modules en forme de cônes, plusieurs semaines avant sa
rencontre avec Vénus. Les modules furent construit en titane et hermétiquement
fermés afin de résister aux pressions et températures extrêmes.
Les hublots, construits en diamant et saphir, permirent des mesures sur la lumière
et la chaleur. Aucun de ces modules n'était cependant conçu pour
survivre au crash de l'atterrissage. Les cinq éléments entrèrent
dans l'atmosphère de Vénus en temps voulu. Comme prévu,
le vaisseau et ses quatre modules furent détruits. Cependant, jusqu'au
moment de leur destruction, tous les modules transmirent une grande quantité
de données. Un des modules survécut à l'impact et transmit
des données pendant 67 minutes supplémentaires.
Le radar installé sur le module orbiteur cartographia lentement la surface
depuis l'espace, révélant un plateau géant de 3200 x 1600
km, 5 km plus haut que la zone avoisinante. Plus loin, le radar découvrit
un canyon gigantesque de 1400 km de long, de 280 km à l'endroit le plus
large, et de 4,6 km de profondeur, ainsi que plusieurs vieux cratères
d'impact de 600 à 700 km de diamètre et de seulement 0,5 km de
profondeur.
En 1981, l'Union Soviétique lança Venera 13 et 14. Ils découvrirent
que les rochers sont similaires à ceux présents sur Terre et comportent
du basalte. Ces rochers contiennent de forts taux d'uranium, de thorium et de
potassium. Les sondes transmirent des images de télévision couleur
vers la Terre. Le paysage apparut jaune, étant illuminé par de
la lumière jaune. Venera 15 et 16 en 1983, cartographièrent
la surface de Vénus par radar, ce qui permit la publication d'un
atlas de Vénus. Les deux-tiers de la surface sont montagneux, et un quart
comporte un paysage plat à faible altitude.
En 1985, les scientifiques soviétiques envoyèrent des sondes
vers Vénus pour une double mission : Vega 1 et Vega 2 passèrent
tout d'abord à proximité de la comète de Halley dont des
images furent prises, avant de se rendre vers Vénus. Des capsules avec
ballons furent lâchées dans l'atmosphère de la planète
pour atterrir sur la surface.
En 1989, les Etats-Unis lancèrent la sonde Magellan vers Vénus
par l'intermédiaire de la navette Atlantis. A l'aide d'un radar à
synthèse d'ouverture, Magellan produisit les meilleures cartes et les
plus complètes (environ 98% de la surface de la planète) en 1990-1994.
La résolution des cartes est de 100m et les altitudes sont mesurées
avec une précision de 30m. La cartographie radar a révélé
des canyons, des montagnes, des cratères, des volcans et des formations
volcaniques.
Suivant les décisions de l'IAU (Union Astronomique Internationale),
la surface de Vénus suit une nomenclature de noms féminine : déesses,
héroïnes et autres femmes célèbres. Maxwell Montes,
en l'honneur du physicien célèbre James Clerk Maxwell, est une
exception. Des suggestions pour les noms sont les bienvenues, elles ne doivent
cependant pas avoir de contenu politique.
Pour plus d'informations sur les méthodes et techniques de cartographie planétaire, vous pouvez visiter la page the Mercury mapping page . Pour des informations sur comment sont nommés les structures à la surface des planètes et de la Lune, voir la page : http://planetarynames.wr.usgs.gov.